• Exilés réunionnais. L'État va peut-être demander « pardon »   

    De 1963 à 1982, plus de 1600 enfants ont dû quitter la Réunion pour se rendre en métropole. 

    De 1963 à 1982, plus de 1 600 enfants ont dû quitter leur île pour la métropole. Beaucoup ne se sont jamais remis de ce voyage sans retour.

    La députée PS de la Réunion à l’origine de cette initiative, Erika Bareigts, veut que la France reconnaisse officiellement toutes les souffrances qu’elle a fait endurer à nombre de ces enfants, dans cette affaire dite des « Réunionnais de la Creuse ». En voici les dates principales. 

    Mai 1963 : Michel Debré est élu député de la Réunion. Face au dépeuplement des régions rurales en France, il souhaite mettre en place un transfert de population, de la Réunion vers les départements concernés. Il est convaincu que c’est une bonne solution, à la fois profitable à la France, mais aussi aux Réunionnais sélectionnés, car cette mesure devrait permettre de les sortir de la pauvreté et de leur donner une éducation. À cette époque, l’île de la Réunion connaît une explosion de la natalité. 

    Janvier 1966 : Sur une pleine page, le journal La Montagne se fait l’écho de l’inquiétude du conseil général de la Creuse, suite au dernier recensement. Il est dit que ce département a perdu 8000 habitants en deux ans. Dans les mois qui suivent, des voix se font de plus en plus entendre pour trouver une solution à ce problème. Les transferts entre l’île et la métropole s’intensifient. 

    Août 1968 : Le quotidien communiste réunionnais Témoignages s’interroge sur une « chasse aux enfants », et parle même de « rafles ». Le directeur du foyer de Guéret (Creuse), qui accueille les enfants, fait part de ses « réserves » face à ces accusations. Cela n’arrête en rien la politique migratoire de l’État, qui continuera jusqu’en 1982. 

    1975 : À la faveur d’un contrôle, des émissaires du ministère de la Santé découvrent la présence de plusieurs Réunionnais dans un centre recevant des enfants atteints de troubles psychiatriques. Le Professeur Pierre Denoix, directeur général de la Santé, s’insurge contre ce procédé. Il vilipende avec force le système et parle de « déportations » d’enfants. 

    1982 : Fin de cette politique de transfert de peuplement entre la Réunion et la France. 

    2002 : Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, publié en 2002, parle de plus de 1600 enfants envoyés dans 64 départements français touchés par l’exode rural, entre 1963 et 1982. Cette même année, Jean-Jacques Martial, réunionnais d’origine et arrivé dans la Creuse à l’âge de 7 ans, attaque l’État pour « enlèvement et séquestration de mineurs, rafle et déportation ». Il demande 1 milliard d’euros de réparation pour son « enfance volée », histoire de marquer le coup. Il est le premier des « déportés » à faire appel à la justice. Si ce procès n’a pas abouti, il a créé une onde de choc et a permis de délier les langues. 

    18 février 2014 : Les députés doivent se prononcer sur une « résolution mémorielle » et sur la « responsabilité morale de l’État ». Cette action n’a qu’une portée symbolique, mais essentielle pour tous ceux qui ont souffert de leur éloignement avec la Réunion.

    Article paru dans Ouest-France le 19/02/2014


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique