• Mon pays

     Mon pays, c'est la plaine où chante la lumière,

    Le golfe lumineux, au flot étincelant,

    Une montagne blonde, à mes pas familière,

    Brillant de tous ses feux, la nuit de la Saint-Jean.

      

    C'est la fleur du pêcher, fragile sous la pluie,

    Que déverse l'avril, capricieux mutin :

    C'est l'âtre qui crépite où l'aïeule éblouie

    Attise la cendrée aux lueurs du matin.

      

    C'est la vigne blottie au cœur de la montagne,

    Qui descend se baigner aux plages du Racou...

    Le Vallespir en fleurs, les blés lourds de Cerdagne,

    Et par dessus l'azur, le puissant Canigou.

      

    Mon pays c'est le ciel triomphal de lumière,

    Tous les feux de midi sur les fruits du verger :

    L'aube intacte élevant au-dessus de l'Albère,

    Comme une hostie en feu, le soleil retrouvé.

     
    C'est la fille aux grands yeux, sur le chemin, qui passe

    Souple comme un rameau, par le vent balancé,

    C'est l'adieu d'un rayon dans le soir, qui s'efface

    Sur la tuile rougie au toit d'un vieux clocher.

      

    Mon pays, c'est l'appel des chapelles romanes,

    Parmi le chêne-liège et les micocouliers,

    Le chant de la tenora et les nobles sardanes,

    Que la brise disperse au hasard des halliers.

     
    C'est l'homme aux bras noueux à la nuque brunie,

    Par l'ardeur des saisons et les travaux des champs.

    C'est l'automne doré où la grappe cueillie

    Se charge en vin nouveau qui exalte nos chants.

      

    Mon pays c'est aussi le petit cimetière

    Où crissent les grillons aux cris exaspérés,

    Qui ont pour compagnon le soleil sur la pierre,

    Dans le calme profond des farouches cyprès.

      

    C'est la douce glycine à la fleur surannée,

    La treille qui s'éveille aux rumeurs du matin,

    Et ta splendeur unique ô Méditerranée,

    Qui donne ton accent, à notre sol latin.

      

    Mon pays, c'est l'odeur de la terre féconde,

    Qui parfume mon cœur au rythme lent des jours :

    C'est ta voix Roussillon qui gronde ainsi qu'une onde,

    Lorsque le vent du nord siflle sur les labours.

      

    De l'onde sans fureur mon chant d'amour s'élève,

    Il s'en ira au loin sur les flots, emporté,

    Et la mer doucement bercera comme un rêve,

    La voix qui montera de son éternité.

      

    Voyageur, si tu vois sur le bord de la route,

    Fleurir près du genêt l'humble thym odorant :

    Près du chemin désert, une chèvre qui broute,

    Arrête-toi, c'est là mon pays catalan.

     

    Lucien VILAR 


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