• Eugène JOSSET Instituteur libre à Péaule (1ère partie)

    La Semaine Religieuse du diocèse de Vannes, en nous annonçant, dans son numéro du 15 avril 1916, la mort au champ d'honneur de M. Eugène Josset, terminait ainsi :  « C'est un nom de plus à inscrire au livre d'or de l'enseignement chrétien. » Nous pouvons ajouter : c'est un nom de plus à inscrire au livre d'or du Petit-Séminaire de Ploërmel.

    Après quelques mois de leçons prises auprès de son frère, alors vicaire à Lanouée, Eugène Josset vint aux Carmes comme élève de Cinquième.

    C'était un enfant un peu timide, mais bon, pieux, qui semblait marqué pour le sacerdoce, Il y aspirait lui-même de tout son cœur, et pendant quelque temps fut au comble de ses vœux.

    Mais les devoirs et les obligations du prêtre sont immenses, les responsabilités qu'il encourt sont terribles, effrayantes. A les méditer, certaines âmes timides et craintives en sont très impressionnées : quelques-unes, déconcertées, se jugent incapables de porter un tel fardeau. Eugène Josset fut de celles-là . Il n'osa pas aller jusqu'au bout, et rentra dans le monde. Il lui fallu alors songer à orienter sa vie dans une autre direction. N'ayant pas voulu devenir prêtre par un scrupule excessif sans doute, il résolut de se consacrer à l'instruction chrétienne de l'enfance, et se fit la carrière la plus belle après le ministère sacerdotal, celle d'instituteur chrétien, carrière qui permet de faire le plus de bien, de travailler le plus à la gloire de Dieu en façonnant les âmes des enfants, en formant leurs intelligences aux connaissances humaines et leurs cœurs à la pratique des vertus chrétiennes. Eugène Josset se mit donc à travailler pour avoir son brevet et, aussitôt en règle avec la loi, il fut envoyé comme instituteur adjoint à Carentoir d'abord, puis à Péaule, Dans cette dernière paroisse, il retrouvait comme recteur , M. le chanoine Deblond, qui l'avait reçu chez lui à Lanouée quand il prenait des leçons de latin. Le bonheur de se retrouver fut réciproque, et entre le pasteur et l'instituteur se renouèrent les relations d'intimité de jadis.

    Ce qu'Eugène Josset fut comme instituteur, M. le Doyen de Péaule l'a dit en chaire le jour de son service :  « Ce fut un vrai maître d'école, instruit, méthodique, clair, sachant proportionner son enseignement à la force de ses élèves, se faire petit avec les petits, élever ses leçons avec les plus avancés. Avec cela beaucoup de dévouement, de la persévérance, de la ténacité même. Son instruction reconnue de tous, sa haute taille, sa forte voix lui donnaient une grande autorité qu'il savait faire aimer, et des succès surprenants surtout dans l'enseignement du catéchisme. »

    En 1914, à la mobilisation, Eugène Josset fut appelé comme infirmier, il partit avec enthousiasme. Son patriotisme, un peu exubérant peut-être, lui fit trouver longs les jours qu'il passa à Nantes avant de recevoir une destination. Enfin cette destination vint, et Eugène fut désigné pour faire partie d'un groupe divisionnaire de brancardiers.

    Avide de dévouement, il recherchait toutes les occasions de se dépenser et de porter secours aux blessés. Le 17 janvier 1916, il écrivait à un ami : « Je quitte l'Artois pour sauter dans la Meuse. Dans quelques jours notre formation sera bien près des Boches. Cette existence me plaît, et ce sera pour moi une nouvelle occasion de me dévouer. » Et à un autre : « Cette vie périlleuse me plaît, malgré ses dures fatigues, car je sais que j'y fais bien. Ah ! Qu'à certains moments je voudrais être prêtre pour mieux consoler et soulager nos pauvres blessés. » De fait, il pensait et parlait comme un prêtre, si bien qu'on le croyait tel : « N'aie pas peur, disait-il un jour à un séminariste pris d'épouvante, le bon Dieu sait bien où faire tomber les obus, tu n'as qu'à t'en remettre à sa garde. » Dans la lettre citée plus haut il ajoutait :  « Je ne sais ce que la Providence me réserve cette fois, mais je suis bien résigné à sa sainte volonté, que Dieu prenne ma vie, s'il le faut, pour le salut de la France ! Priez toujours bien pour moi, afin que je puisse remplir mon devoir. »

    Plusieurs fois Eugène Josset vit la mort de près, elle ne l'effraya pas, parce qu'il était prêt à la recevoir, elle ne l'empêcha pas surtout d'accomplir nombre d'actions de courage : « Sur le champ de bataille de l'Artois, on l'avait vu braver la mitraille, et encourager son équipe effrayée. Sous Verdun, à son grand regret, il fut surtout employé comme ravitailleur, mais il se rendait compte que ce métier avait aussi ses dangers. La veille de sa mort, en chargeant du bois, il faisait remarquer à ses compagnons que la mort planait sur le bois où ils se trouvaient comme dans la tranchée, puisque deux jours auparavant les pièces ennemies avaient battu cet endroit.

    Il ne se trompait pas, la mort planait partout dans ces régions dévastées, puisque c'est à six kilomètres de Verdun, à douze du front qu'elle est venue le frapper pendant qu'il était occupé à relever un auto-camion.

    Livre d'Or du Petit-Séminaire de Ploërmel


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