• Des Bretons revendiquent le Nouvel an celtique

    Le Centre de l’imaginaire arthurien propose de son côté depuis le début des vacances de Toussaint, dans la mythique forêt de Brocéliande, balades contées et veillées autour du Nouvel an celtique. Thierry Creux - Ouest France

     

    Alors qu’une nouvelle déferlante de zombies, vampires et autres squelettes envahissent les vitrines des commerçants, les bars et les rues à l’occasion de la fête anglo-saxonne d’Halloween, de plus en plus de Bretons font revivre son ancêtre: la Samain. La célébration du Nouvel an celtique aura lieu ce mercredi dans le Finistère. 

    Trop américaine, trop commerciale… De plus en plus de Bretons se détournent d’Halloween, lui préférant sa version originale, la Samain, Nouvel an celtique que tentent aujourd’hui de se réapproprier les cercles druidiques et les milieux culturel et touristique de la région. 

    Les membres de la Gorsedd (fraternité druidique, N.D.L.R.) de Bretagne ont rendez-vous dans le Finistère mercredi, quelque part entre le lac de Brennilis et le mont Saint-Michel de Brasparts, terre de mythes et de légendes. 

     

    Un mélange de recueillement et de félicité 

    Drapés de leurs saies blanches ou vertes au milieu de la lande automnale, ils y célébreront comme chaque fois la Samain (Samhain en irlandais) dans un mélange de recueillement et de félicité. 

    «C’est pour nous la cérémonie la plus importante de l’année», explique Ludo, l’un des druides de la Gorsedd. «Elle permet d’honorer les morts mais n’est pas triste pour autant car elle invite au partage, au dialogue avec ceux qui nous sont chers. On en tire beaucoup de force.»

     

    Nouvel an celtique 

    La Samain marquait, chez les Celtes, le début de la période sombre. Considérée de nos jours comme le Nouvel an celtique, cette fête hors du temps, qui donnait lieu d’après la mythologie à d’imposants festins, voyait l’ouverture des portes entre notre monde et celui des morts. 

    On la situe souvent à tort autour du premier novembre, «date choisie par l’Église au IXe siècle pour sa fête des saints martyrs en réponse à la persistance des rites païens», note Grégory Moigne, doctorant en celtique et histoire des religions à l’université de Brest. 

    Si la date pose encore question, une chose est sûre: les Irlandais, en émigrant aux États-Unis au XIXème siècle pour fuir la misère et la grande famine frappant leur île, sont à l’origine d’Halloween, «une vision très folklorique de la Samain», selon le chercheur. 

     

    Renouer avec les traditions 

    Lassés des chapeaux de sorcière, des fausses toiles d’araignée et des collectes nocturnes de friandises, les Bretons sont de plus en plus nombreux à vouloir renouer avec leurs traditions ancestrales. 

    C’est ce qui a poussé Charles Castrec à créer le Samaïn Fest, un festival en soutien à l’école Diwan de La Mézière (Ille-et-Vilaine) alliant musique métal et culture celtique. 

    «Nous voulions briser les codes, fêter la Samain pour nous écarter du côté mercantile d’Halloween tout en montrant que la Bretagne, ce n’est pas que biniou, bombarbe et galettes», dit l’organisateur 

     

    Des bougies dans les betteraves 

    À Saint-Quay-Portrieux (Côtes-d’Armor), la municipalité, soucieuse d’étendre sa saison estivale, a lancé en 2014 sa fête de la Samain, «plus en résonance qu’Halloween avec les adultes et la culture locale», selon l’adjointe au maire, Sophie Lathuillière. 

    «Des personnes très âgées nous ont dit qu’elles avaient l’habitude, dans leur enfance, de placer des bougies dans des betteraves. Ces traditions s’étaient perdues depuis deux générations, mais il ne fallait pas grand-chose pour les faire revenir», poursuit-elle, espérant faire mieux que les 6000 personnes rassemblées l’an dernier. 

     

    Renouer avec le passé 

    Le Centre de l’imaginaire arthurien propose de son côté depuis le début des vacances de Toussaint, dans la mythique forêt de Brocéliande, balades contées et veillées spectacles autour du Nouvel an celtique. 

    «Halloween s’était un peu essoufflé, mais on observe un nouvel engouement depuis 3 ou 4 ans autour de la Samain», relève Virginie Beguinel à l’office de tourisme de Brocéliande. «Nos animations ne mentionnent d’ailleurs quasiment plus Halloween, si ce n’est pour expliquer ses origines. Les gens sont demandeurs de références celtiques.» 

    Pour Grégoire Moigne, qui prépare une thèse sur le druidisme contemporain, ce retour aux racines s’inscrit dans «une recherche d’identité personnelle et collective». 

    «Fêter la Samain, c’est renouer avec un passé dont nous connaissons finalement peu de chose. C’est un moment festif que se sont approprié les profanes», ajoute-t-il. 

     

    Une bière spéciale 

    Mais après Halloween, la Samain n’est pas à l’abri d’une exploitation commerciale. La brasserie morbihannaise Lancelot brasse ainsi chaque année, dans la nuit du 31 octobre au premier novembre, une bière noire spéciale (à 11,1%), la Samhain XI.I. 

    Article paru dans Ouest-France 


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